Quel est le rôle et le pouvoir réel de la FED (Réserve Fédérale Américaine) ?

27 Janvier 2016

Soyez attentifs lorsque vous écoutez les news à la radio ou lorsque vous regardez une émission TV sur l’économie: il est fort probable que la FED soit évoquée à un moment ou à un autre de l’émission de télévision ou du commentaire radiophonique. Cette Réserve Fédérale Américaine (FED en abrégé, site : www.federalreserve.gov) semble faire la pluie et le beau temps sur l’économie US et donc par voie de conséquence, sur l’économie mondiale. Mais à quoi sert réellement cette FED, et quelles sont les limites de son pouvoir, c’est ce que nous allons essayer d’expliquer !

A quoi sert la FED, la Réserve Fédérale Américaine ?

Quel est le rôle de la FED ?

Pour comprendre à quoi sert la FED, regardons pourquoi elle a été créée ?

Comme bien souvent, la création d’un organisme de contrôle financier fait suite à des problèmes majeurs rencontrés dans la vie économique. Ce sont des paniques bancaires à répétition et particulièrement celle de 1907 qui pousse le Congrès américain de l’époque à créer une structure centrale susceptible de venir en aide aux banques défaillantes. Le 23 décembre 1913, le ‘Federal Reserve Act’ jette les bases de ce que deviendra la Banque Centrale Américaine.

Installée à Washington, D.C., la FED se voit assigné, au-delà de son rôle de pompier auprès des banques, les 3 missions principales suivantes: le plein emploi, la stabilité des prix, et la modération des taux d’intérêt à long terme… bref , les exigences d’un monde économique idéal !

Pour bien montrer la complexité de cette tâche, les anglo-saxons utilisent le terme de ‘uneasy triangle, pour désigner ces 3 missions principales. Mais comme ‘plein emploi’ et ‘stabilité des prix’ sont les 2 plus importantes, vous entendrez également parler de ‘dual mandate’ pour caractériser le rôle de la vénérable institution.

Poursuivons, en passant en revue l’ organisation de la FED

En terme d’organisation, peu de choses ont changé à la FED depuis sa création en 1913. Contrairement aux autres banques centrales (BCE, BoJ, PBoC,..), la FED est privée et appartient aux 12 banques fédérales régionales les plus importantes des Etats-Unis, les ‘Federal Reserve Banks’.

C’est un ‘Board of Governors’, composé de 7 membres qui dirige l’institution. Parmi les membres de ce Bureau, on trouve un vice-président et un président (*) qui sont tous deux désignés par le président des Etats-Unis. Les membres réguliers du Board bénéficient d’un mandat de 14 ans non renouvelable, alors que le président est nommé pour 4 ans (mais sans limitation sur le nombre de renouvellements de mandat).

La conduite de la politique monétaire et la fixation des fameux ‘taux d’intérêt directeurs’ sont attribués à un comité qui tient séance 8 fois par an, ou plus souvent en cas de nécessité. Ce FOMC (Federal Open Market Committee) comprend les 7 membres du Board précédemment cité, auxquels se joignent le président de la Federal Reserve Bank de New York, ainsi que 4 autres représentants des 11 autres Federal Reserve Bank (qui interviennent en alternance).

Note (*) : Qui ne connait pas le président de la FED ? Aussi connus que les chefs d’états des plus grandes nations, les Paul Volcker (1979-1987), les Alan Greenspan (1987-2006), les Ben Bernanke (2006-2014) ou la toute dernière Janet Yellen (nommée par Barack Obama le 9 octobre 2013 et entrée en fonction le 31 Janvier 2014) jouissent d’une notoriété planétaire.

Quant au rôle de la FED, il a évolué au cours du temps

Si l’organisation de la vénérable institution a peu bougé depuis sa création, il n’en est pas de même des missions qui lui ont été confiées, des missions toujours plus complexes au fil du temps.

A sa création en 1913, le gouvernement américain place l’institution sous son contrôle en nommant deux de ses représentants au Board: le Secrétaire du Trésor et le Contrôleur de la monnaie.

En 1929, cette dépendance de la FED au pouvoir central ne facilite pas l’émergence d’une sortie de crise, bien au contraire.

Il faudra attendre 1935 et le ‘Banking Act’ pour que la Réserve fédérale puisse acquérir une certaine indépendance sur la politique monétaire à mener : le Secrétaire d’État au Trésor et le Contrôleur de la monnaie ne sont désormais plus admis à siéger au nouveau FOMC qui vient d’être créé.

Mais c’est sous le long mandat de McChesnet Martin (1951-1970), puis grâce au ‘Humphrey–Hawkins Full Employment Act’ de 1978 que la réserve fédérale acquiers une vraie liberté de manœuvre.

L’emblématique Paul Volker (1978-1987) usera (abusera ?) de cette liberté pour porter les taux d’intérêt à 15 % lors de la crise monétaire de 1980.

Mais le rôle de l’institution de Washington va prendre une importance considérable lors-qu’éclate la crise des subprimes en 2008. En janvier de cette année-là, pour éteindre le début de panique qui commençait à souffler sur Wall Street pour cause d’emprunts toxiques, et sans attendre la tenue de son comité régulier prévu en fin de mois, la FED surprend tout le monde en écrasant subitement son taux directeur à 2,25%.

N’ayant pu éviter la chute de Lehman Brothers en Septembre et ses conséquences désastreuses sur le cours des bourses mondiales, elle récidive en Décembre 2008 en portant ce même taux directeur à 0% (marge de fluctuation entre 0 et 0.25%), du jamais vu ! Ce faisant, elle génère un effondrement du dollar contre les autres devises, ce qui a pour effet immédiat de faire grimper de façon drastique le cours de l’or physique.

Mais la crise n’est pas stoppée pour autant, alors que la banque centrale américaine est à cours de munition, ses taux étant à zéro. Que faire ?

Hantée par la perspective d’une crise systémique (genre crise de 1929), la FED reçoit alors carte blanche pour sauver le système financier de la planète.

Et c’est là que son rôle va considérablement changer de braquet. Il ne s’agit plus de faire varier les taux directeurs, mais bien de racheter toutes les dettes ‘pourries’ accumulées par les banques depuis la fin de la crise des dot.com et le début de la crise de l’immobilier US.

En un an, le FED rachète ainsi 3 500 milliards de dollars de dettes, injectant un équivalent en liquidités sur le marché : c’est le début de la fameuse (et controversé) politique accommodante ou QE (Quantitative Easing).

Mais l’économie US étant toujours malade, ce premier QE sera suivi d’un QE2, puis d’un QE3. Il aura fallu finalement 7 bonnes années et des injections massives de liquidités dans le système monétaire mondial pour que l’économie américaine reparte tant bien que mal, mais pour combien de temps ?

Pourquoi le rôle de la FED est-il si controversé de nos jours ?

Le rôle de la FED (et des banques centrales en général) est de plus en plus critiqué, justement depuis la mise en place de ces politiques accommodantes.

Il est vrai que cette politique monétariste qui consiste à injecter toujours plus de liquidité dans le système bancaire (et à faire croitre toujours plus la dette mondiale!) est particulièrement inquiétante.

A titre d’exemple, le Japon, qui s’était lancé lui aussi dans une telle aventure, et cela dès le début des années 2001, n’a toujours pas retrouvé un niveau de croissance acceptable…et cela 15 ans plus tard ! Et son endettement est le plus élevé de la planète, frôlant la barre des 200% du PIB !

En ce début 2016, un livre de Patrick ARTUS & Marie-Paule VIRARD vient de sortir, intitulé :

« La folie des banques centrales : Pourquoi la prochaine crise sera pire »

Les auteurs, respectivement Chef économiste de Natixis et Journaliste Economique, expliquent pourquoi une telle politique monétariste nous mène droit dans le mur. Selon eux, les patrons des banques centrales : Mario Draghi pour la zone Euro (*) et Janet Yellen pour les États-Unis, sont des rois déchus qui n’ont plus d’armée (sous-entendu : n’ont plus de marge de manœuvre !).

Note (*) : La BCE présidée par Mario Draghi vient elle aussi de se lancer dans un plan d’assouplissement (Mars 2015) et a annoncé vouloir renforcer ce plan lors du premier anniversaire de celui-ci !

Mais ARTUS et VIRARD ne se contentent pas de critiquer le système, ils essaient d’apporter des solutions pour engendrer prospérité, richesses et emplois…tout ce qui manque à nos économies sous perfusion permanente !

Ce message, comme bien d’autres allant dans ce sens, sera-t-il entendu ? Rien n’est moins sûr, mais si rien n’est fait, …nous finirons par atterrir dans le mur ! Et ce jour-là, il vaudra mieux avoir mis de côté quelques lingots d’or pour se retourner !