Défauts de remboursement partiels de la dette publique chypriote en 2012-2013
Située dans la partie orientale de la Méditerranée, l’île de Chypre a adhéré à l’Union européenne le 1er Mai 2004 et adopté l’Euro au 1er Janvier 2008, abandonnant sa monnaie nationale, la livre chypriote.
Un peu à l’image de l’Islande (dont la bulle spéculative allait se dégonfler violemment cette même année 2008 pour cause de crise des subprimes), Chypre se lance alors dans un modèle économique similaire, offrant une grande place à son système bancaire qui se développe à tout va, offrant à ses clients des rendements substantiels et une fiscalité attractive (taxe unique de 10% sur les bénéfices), peu regardante sur l’origine des fonds investis.
Dès 2011, pour faire face à ses premiers déboires financiers, le gouvernement communiste de l’époque lève 2,5 milliards d’euros d’aide auprès de l’ami Russe.
Attirées par des rémunérations importantes, les banques chypriotes achètent des parts importantes de la dette grecque. Aussi, lorsque éclate la crise du voisin helvète en mars 2012, les banques insulaires perdent une grande partie de leurs avoirs (de l’ordre de 4 milliards d’euros).
Un an plus tard, incapables de faire face à leurs remboursements, les autorités chypriotes demandent alors un plan de sauvetage à hauteur de de 17 milliards d’euros à la Troïka (FMI, BCE, Commission européenne), un montant à peu près équivalent à son PIB de l’époque.
Le 16 Mars 2013 un premier plan est proposé par celle-ci, mais refusé par le parlement chypriote: ce plan proposait un prélèvement exceptionnel 6,75 % sur les dépôts bancaires (jusqu’à 100 000 euros) et 9,9 % au-delà.
Le 25 Mars 2013 un 2ème plan est élaboré et adopté cette fois : prêt de 10 milliards d’euros, contrôle strict des capitaux et exonération des petits épargnants, en accord avec la directive européenne de ne pas toucher aux dépôts inférieurs à 100 000 euros. Par contre, pour récupérer 5,8 milliards supplémentaires, les comptes bancaires affichant un solde supérieur à 100 000 euros subissent une imputation de l’ordre de 40% en moyenne: une première (*) en zone euro !
Note (*) : En faisant payer lourdement les épargnants (qui n’étaient pourtant en rien responsables de la folie spéculative des banques chypriotes !), la Troïka expérimente ainsi un mode de règlement de crise qui pourrait être reconduit en cas de faillite de pays plus important que la petite île méditerranéenne. Si vous êtes un épargnant avisé, vous devez mieux comprendre pourquoi nous recommandons de détenir de l’ordre de 10% de votre patrimoine en or physique : en cas de faillite, l’état n’ira pas vous demander de lui restituer 40% de vos lingots d’or stockés en Suisse ou à Singapour !
Pour éviter un bank run pendant les négociations avec la Troïka, le gouvernement chypriote a été obligé de fermer ses banques pendant 12 jours. Il a également imposé des plafonds de retraits aux ATM et à interdit purement et simplement les virements de fonds par Internet.
Mais le plan de sauvetage prévoit également une augmentation des impôts des particuliers et des sociétés, ces derniers passant de 10 à 12,5%. Et à cela s’ajoute toute une batterie de mesures coercitives, comme la diminution des effectifs de la fonction publique, ou plus récemment la demande, refusée (**), de privatisation de secteurs entiers de l’économie (des sociétés de télécom, des compagnies d’électricité et même les 2 principaux ports du pays étaient concernés !).
Note (**) : Cette tentative de privatisation que souhaitait imposer la Troïka a provoqué la démission en bloc, le 28 février 2014, de tous les ministres chypriotes du président : Nikos Anastasiadies
Malgré une amélioration notable du fonctionnement de son système bancaire, Chypre n’est pas encore sortie de l’auberge et a du mal à payer ses traites. Elle affiche en 2015 une quatrième année consécutive de récession et un taux de chômage de 16%. Il aura fallu attendre Avril 2015 pour que le gouvernement chypriote se décide enfin à lever le contrôle des capitaux mis en place lors des premiers symptômes de la crise de la dette.
Et cette dette souveraine chypriote ne semble pas vouloir se résorber : de 112% en 2013 elle a atteint 126% du PIB en 2014. Seul espoir pour sortir de la crise: le développement du tourisme (toujours très apprécié des russes et européens), la découverte d’un gisement de gaz appelé Aphrodite (un gisement qui reste encore à exploiter) et pourquoi pas les retombées positives d’un accord de réunification des 2 communautés (grecques et turques) vivant sur l’île et séparées depuis 40 ans.