Allemagne, rien ne va plus : Banques, Immigration, Russie, Attentats, Pauvreté,…
26 Aout 2016
Voilà plusieurs décennies que nos politiciens n’ont de cesse, de ce côté du Rhin, de nous vanter les mérites du modèle Allemand. Et sur le papier, il faut bien reconnaître que notre principal partenaire européen ne manque pas d’atouts : 4ème puissance économique mondiale derrière les USA, la Chine et le Japon ; 3ème plus grand exportateur mondial derrière les USA et la Chine ; 1ère puissance européenne,… Pourtant , l’ancienne république de Wehrmacht n’est pas au mieux de sa forme et se prépare à des jours plus sombres comme le laisse présager sa dernière initiative en date : la remise à jour de son plan de défense civile !
Ce plan (un document de 69 pages) recommande à la population germanique de faire des provisions d’eau et de nourriture pour pouvoir s’alimenter pendant 10 jours. Il traite également des mesures à prendre en cas d’interruption d’électricité ou de coupure d’eau. Enfin, plus inquiétant, il donne des directives en cas d’attaques chimique, atomique ou même biologique.
L’adoption de ce plan de défense civile a été faite le Mercredi 24 Aout par le gouvernement allemand. Le ministre de l’Intérieur Thomas de Maizière (l’équivalent de notre Bernard Cazeneuve) a expliqué à la presse qu’il s’agissait ni plus ni moins que de « préparer le pays à répondre à des scénarios catastrophes ».
Devant le tôlé (*) et les inquiétudes légitimes véhiculées par les médias d’outre-rhin, le porte-parole de la chancelière Angela Merkel a essayé de calmer le jeu et a indiqué qu’il ne s’agissait en fait que « d’une actualisation d’un plan qui avait vu le jour en 1995 » et n’avait « pas de lien avec un éventuel danger immédiat ».
Note (*) : Les réseaux sociaux se sont moqués de ce plan et un hashtag « Hamsterkauf » voulant dire ‘achats de hamsters’ a même été créé pour servir de défouloir à une jeunesse sceptique sur les motivations réelles sous-jacentes à ce plan. De plus les Verts et la Gauche allemande ont reproché à ce plan de semer la panique auprès de la population.
Mais malheureusement, de la situation catastrophique de la Deutsch Bank à la menace hégémonique du voisin Russie, en passant par la crise migratoire et le risque d’attentat, sans oublier l’augmentation de la pauvreté, les sujets d’inquiétudes sont bien réels en Allemagne ! Nous allons les passer en revue.
Le risque de faillite de la Deutsch Bank
Rien que le titre de notre chapitre pourrait prêter à sourire. Présente dans plus de 75 pays, occupant la 8ème place en Europe en terme de capitalisation (données 2011, mais en très forte baisse depuis !), monument de la suprématie économique germanique en Europe depuis 1870, comment la plus grosse banque allemande de tous les temps pourrait-elle faire faillite?
Et ce n’est pas le lanceur d’alerte Eric Ben-Artz (un ex employé de la DB qui vient de refuser 8 millions de dollars de prime pour avoir dénoncé des irrégularités au sein de la banque allemande) qui nous interpelle sur ce risque majeur, …mais bien le FMI en personne !
En effet, l’illustre organisation internationale dirigée par Christine Lagarde a indiqué, fin Juin 2016, qu’une faillite de la DB « n’était pas impossible » et avait le potentiel de « générer une crise systémique au niveau mondial ».
Nous avons encore tous en tête la chute de Lehman Brothers au beau milieu de la crise des subprimes US et cette perspective de banqueroute de la DB nous fait froid dans le dos !
Pire, pour la 2ème fois, la banque allemande vient d’échouer ses « stess tests », des essais de résistance des banques élaborées par la FED post 2008 pour éviter justement…un nouveau Lehman !
Côté capitalisation, la DB a vu son cours de bourse divisé par 10 en 9 ans : de 100€ en 2007, l’action de la Deutsch Bank n’est plus que d’une dizaine d’euros à l’été 2016.
Si l’état allemand devait renflouer son ex fleuron avec l’argent des contribuables (‘bail out’), ce qui est à priori interdit par les nouvelles règles européennes BRRD de la BCE, l’impact sur la croissance allemande serait majeur (on parle ici d’un besoin de 95 milliards de recapitalisation !).
Quant au ‘bail-in’ (faire payer les détenteurs de compte de la banque) il ne vaut mieux ne pas y penser. Dans ce cas, vous vous doutez bien que le plan de défense civile teuton ne serait tout au plus…qu’un simple emplâtre sur une jambe de bois !
Le risque géopolitique avec l’hégémonie de la Russie de Poutine
Il est désormais bien loin le sentiment pro-russe qui avait vu le jour après la chute du mur de Berlin et la réunification allemande. Moscou était alors qualifié de « partenaire sans égal pour sa coopération avec l’UE et avec l’OTAN ».
Mais la crise ukrainienne, l’invasion de la Crimée et les différents sur le conflit Syrien sont autant de discordes qui sont apparues entre l’UE et la Russie de Poutine. En tant que proche voisin, l’Allemagne est concernée au premier chef par ce changement radical de comportement.
Début Juillet, la ministre de la défense allemande Ursula von der Leyen présentait un Livre Blanc sur la défense dans lequel la Bundeswehr devrait désormais « s’impliquer d’avantage sur la scène internationale ».
Parmi les 10 menaces passées en revue dans cette feuille de route militaire, la Russie est qualifiée de « pays qui remet en question la paix en Europe, notamment après l’annexion de la Crimée, en 2014 ». Mettant fin à une certaine frilosité dans le domaine militaire (conséquence de son passé militariste) la Bundeswehr doit se doter de 7 000 soldats supplémentaires d’ici 7 ans (ils sont 185 000 en 2016), auxquels devraient se joindre 4 400 personnels civils.
Au dernier sommet de l’OTAN des 8 et 9 Juillet 2016, les 28 chefs d’états et de gouvernement ont décidé de déployer 4000 hommes en Pologne et dans les Etats Baltes.
Ce renforcement militaire est le plus important depuis la Guerre froide et l’Allemagne s’est proposée pour assurer le commandement d’un des 4 bataillons.
Est-ce que cette montée en puissance de la Bundeswehr et ce déploiement de forces de l’OTAN aura un impact sur les velléités hégémoniques de Vladimir Poutine ? Cela n’est pas si sûr ! Mais en attendant il fait monter la tension entre l’Europe et la Russie.
Le risque (opportunité ?) lié à la politique migratoire allemande
Parmi les 10 menaces principales listées dans le Livre Blanc dont nous avons parlé précédemment, les migrations incontrôlées n’arrivent qu’en 8ème place, juste avant les pandémies. Il faut dire que la population allemande est vieillissante et que l’immigration « contrôlée » est une opportunité pour alimenter en main d’œuvre les usines d’outre-rhin.
Le risque pointé par les experts concerne l’immigration « incontrôlée », celle que relatent les médias à longueur de journée avec les insoutenables naufrages de migrants en méditerranée.
Un récente enquête de l’Ipsos menée cet été 2016 dans 22 pays montre que les Allemands (avec les Anglais) sont les européens les plus « tolérants » avec l’immigration. Ils sont 1 sur 2 à considérer que les immigrés ne sont pas trop nombreux dans leur pays. Par contre, interrogés sur le caractère « positif » de cette immigration, ils ne sont que 18% à répondre favorablement en Allemagne, un chiffre très en deçà des 35% relevés en Grande-Bretagne par exemple.
Suite à des amalgames hasardeux, il faut bien reconnaitre que la vague d’attentats qu’a connu l’Allemagne ce printemps ne facilite pas le processus d’intégration de ces migrants (en grande majorité de confession musulmane) auprès de la population. Pour mémoire, l’Allemagne a accueilli 1 million de réfugiés en 2015
Et on est désormais loin de l’écho favorable qu’avait trouvé la Chancelière, en déclarant fin 2015 dans son discours de Nouvel an, que « l’afflux massif de réfugiés était une chance pour l’Allemagne ». Angela Merckel avait d’ailleurs reçu alors le titre prestigieux de “personnalité de l’année” à la fois par le magazine Time et par le Financial Times.
Le meilleur baromètre du rejet de sa politique d’accueil est de voir la progression d’un nouveau parti populiste opposé à l’immigration: l’AfD (Alternative pour l’Allemagne) serait créditée de presque 10% des voix dans les derniers sondages.
Le risque d’attentats en Allemagne
Même s’il s’en défend (pour ne pas affoler la population), le plan de défense civile qui vient d’être remis à jour et présenté par Thomas de Maizière (celui dont nous parlions au début de notre exposé) est un des éléments de réponse à la série d’attentats qu’a connu l’Allemagne au début de l’été 2016.
Il y a d’abord eu l’homme à la hache qui a sévit auprès des passagers d’un train à Wurtzbourg, puis la fusillade de Munich (9 morts) par un germano-iranien, l’assassinat d’une femme enceinte à la machette à Reutlingen et plus récemment ce refugié syrien qui s’est fait exploser à Ansbach, provoquant de nombreux blessés.
Même si seulement 2 de ces attaques ont été revendiqué par le groupe djihadiste Daech, la population a tendance à faire des amalgames entre toutes ces violences. Et les carnages perpétrés en France et en Belgique (bien plus conséquents en vies humaines) sont encore dans tous les esprits outre-rhin.
Toute cela conduit à la montée du sentiment d’insécurité et à la progression des populismes.
La paupérisation du modèle social allemand
Un autre sujet de préoccupation est l’accroissement de la pauvreté en Allemagne. Là aussi un vrai paradoxe quand on est un des plus grand pays exportateur au monde, affichant 1,7% de croissance (2015 et prévisions 2016) et un taux de chômage de l’ordre de 6% (été 2016).
La dernière étude sur le sujet (Février 2015) indiquait que 12,5 millions de personnes vivaient sous le seuil de pauvreté en 2013, soit 15,5% de la population.
L’étude a montré que la disparité entre les Länder était très forte et s’était même accrue depuis le dernier exercice effectué en 2006 : Bade-Wurtemberg et Bavière étant les mieux lotis, contrairement au Nord du pays avec le Land de Mecklembourg-Poméranie antérieure et les villes de Brême et de Berlin.
La situation ne semble pas s’améliorer, puisqu’une étude plus récente (Juin 2016) portant cette fois uniquement sur les enfants allemands, montre qu’un jeune allemand sur 7, âgé de moins de 15 ans, dépend des aides sociales pour vivre. Et dans la capitale Berlin, la situation serait encore plus dramatique car cela serait un jeune sur 3 seulement qui vivrait grâce aux aides sociales.
Menée par la députée Sabine Zimmerman qui a exploité les données de l’agence fédérale pour l’emploi, cette étude montre que ces jeunes aidés, bénéficiant d’allocations dites de Hartz IV (*), étaient nombreux à être issus de parents d’origine étrangère et/ou de familles monoparentales.
Note(*) : Peter Hartz était le ministre des affaire sociales de Schröder : c’est lui qui a instauré en 2005 les réformes dites « Hartz IV » permettant d’indemniser les chômeurs et les enfants sans ressource.
Et la dernière initiative en date, sensée faciliter l’intégration des migrants, est de proposer 80 centimes d’euros de l’heure sur des postes aidés. Le gouvernement de la Chancelière pense ainsi créer 100 000 emplois sur 3 ans. Si vous prenez 150h par mois, …cela fait un salaire mensuel de 120€ !!!
Si l’initiative va certes dans le bon sens, on ne peut décemment pas parler de « salaires », mais bien de travaux d’utilité publique !
Voilà notre tour d’horizon qui se termine sur la situation économique et géopolitique peu réjouissante de notre grand voisin allemand. Ce marasme germanique se retrouve dans la dernière enquête mensuelle de l’institut Ifo qui vient de publier son indice du climat des affaires pour le mois d’août.
Sans surprise, cet indice accuse sa plus forte baisse mensuelle depuis le pic de la crise de la dette de la zone euro de début 2012. Le rapporteur de cette étude indique que le Brexit a certainement contribué à la chute de cet indicateur. Pour notre part, nous pensons que les préoccupations listées ci-dessus ont été beaucoup plus déterminantes dans la perception de cette dégradation du climat des affaires.
Et le plan de défense civile qui vient d’être remis à jour semble une bien maigre réponse à l’ensemble des problèmes qui risquent de surgir tôt ou tard. Stocker de l’eau pour 5 jours et de la nourriture pour 10 jours va certes dans le bon sens, mais croyez-vous que cela suffira pour mettre à l’abri nos voisins d’outre-rhin. Et si l’Allemagne s’effondre que croyez-vous qu’il se passera en Europe en général et en France en particulier ?
Mes chers compatriotes, il est temps de se constituer un kit de survie à la française, avec certes de l’eau et de la nourriture, mais surtout des lingots et/ou des pièces d’or sonnantes et trébuchantes. Bref une protection qui vous permettra de tenir dans la durée, car si « vraie » crise il y a, vous vous en doutez, …elle risque d’être très longue !