Comment expliquer simplement le krach de la bulle Internet des années 2001-2003 ? Le soufflé au fromage!

Pour comprendre le krach boursier lié à l’éclatement de la bulle Internet des années 2001-2003, il suffit de se représenter simplement la cuisson d’un soufflé (un soufflé au fromage par exemple !). Si vous êtes un tant soit peu cuisinier, ou tout au moins un bon observateur, vous noterez que la cuisson de ce délicieux dessert passe par 3 phases successives : le gonflement (parfois inquiétant !) de la patte, une phase de stabilisation et une retombée pour le moins brutale. Et si vous ne vous êtes pas brulé les doigts en sortant le soufflé du four, il vous restera ensuite à digérer cette spécialité culinaire ! Nous allons voir que l’on peut comprendre les mécanismes de création des bulles spéculatives (et celle de 2001-2003 était particulièrement gratinée !) en se référant à la confection de ce soufflé au fromage.

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La faillite d’Enron et l’éclatement de la bulle Internet des années 2001-2003

Enron et le krach des dot.com

Le gonflement de la pâte : La phase de croissance irrationnelle des actions dot.com : 1996-1999

Rappelez-vous les années 1990-2000 et la vaque incessante de start-ups qui rentraient en bourse. Toutes issues de la nouvelle technologie du Net, ces dot.com (du nom de l’extension en .com de leur site Internet) faisaient la une de la presse économique avec des performances boursières toujours plus irréelles et sans corrélation avec leurs fondamentaux.

C’est l’époque de la rentrée en bourse de Nestscape, de l’envolée des titres de Microsoft, Intel et autres Yahoo, du rachat de Time Warner par AOL,…et de ce côté de l’atlantique de l’entrée en bourse de Wanadoo, la filiale de France Telecom.

On parlera plus tard d’exubérance irrationnelle pour expliquer ce phénomène de moutons de panurge qui a eu pour effet de faire exploser les indices boursiers : le Nasdaq (indice regroupant les valeurs technologiques US) a ainsi été multiplié par 5 en l’espace de 3 ans (1998-2000). Nous étions soi-disant rentrés dans l’ère de « la nouvelle économie », un monde sans usine « fabless », prônée entre autre par le CEO d’Alcatel de l’époque, le patron d’une grande entreprise des Telecom très en vue de ce côté de l’atlantique.

La stabilisation du soufflé: La phase d’observation et d’alerte : 2000-2001

Si les arbres ne montent pas jusqu’au ciel, les soufflés ne gonflent pas non plus au-delà de la taille du plat qui les accueille. Il en a été de même avec les actions des dot.com qui avaient atteint des valorisations extravagantes.

Le premier signal d’alerte apparait en Mars 2000 lorsque le nouveau PDG de Global Crossing (une entreprise de Telecom spécialisée dans les technologies à base de fibres optiques) quitte son poste précipitamment, après seulement 1 an de fonction : il n’a pas obtenu la levée de fonds escomptée à cause de surcapacités accumulées dans le domaine des réseaux à haut débit. L’action de Global Crossing dévisse littéralement en bourse, marquant le début d’une phase de stabilisation du marché des dot.com.

Mais l’euphorie sur les nouvelles technos des télécoms avait été telle que cette première anicroche ne crée pas instantanément la panique. Fusions et acquisitions continuent de plus belle !

Le CAC 40 atteint même son plus haut historique le 4 Septembre 2000 à 6 945 points, du jamais vu sur la place de Paris !

C’est l’époque du rachat d’Orange par France Telecom, de l’empoignade des opérateurs pour s’attribuer les nouvelles fréquences UMTS.

Pourtant de nouvelles faillites apparaissent tout au long de l’année 2001: Winstar Communications (avril), Viatel (mai) ou encore GTS (octobre).

Quant aux évènements du 11 Septembre 2001, s’ils n’arrangent certes pas la situation des dot.com, ils ne sont cependant pas les catalyseurs d’un effondrement annoncé.

Le soufflé se dégonfle subitement avec la faillite d’ Enron: Le krach boursier de 2001-2003

Le catalyseur, ce moment irréel ou la pâte du soufflé se dégonfle subitement (ou la bulle Internet éclate !) a lieu à la fin de 2001, lorsque le géant de l’énergie Enron annonce son dépôt de bilan. Cette faillite entraine celle de l’auditeur de ses comptes, le célèbre cabinet Arthur Andersen qui aurait fermé les yeux sur de nombreux montages offshores litigieux, ayant pour but de maquiller les comptes de son puissant client.

Selon un phénomène similaire à celui créé par la chute de Lehman Brothers lors de la crise des subprimes (qui aura lieu 7 ans plus tard), la faillite du couple Enron/Arthur Andersen aura été le déclencheur du krach de la bulle Internet, l’étincelle qui aura fait exploser le système.

Subitement, les actionnaires floués se rendent compte qu’on peut leur mentir, que les comptes qui leur sont présentés peuvent être entachés de malversations, malgré la caution d’auditeurs soi-disant indépendants et supposés jusqu’à ce jour, irréprochables.

Conséquences : les investisseurs se débarrassent en masse des actions télécom, faisant plonger les bourses mondiales.

Le Nasdaq atteint son cours le plus bas le 9 Octobre 2002. Cinq mois plus tard, c’était au tour du CAC 40 de sombrer à son cours le plus bas le 12 mars 2003: seulement 2410 points, alors qu’il fanfaronnait à 6945 points le 4 Septembre 2000.

Il faut maintenant digérer le gâteau: Les conséquences de l’éclatement de la Bulle Internet

Le soufflé étant tombé, les actionnaires ayant avalé les pertes astronomiques (90% de chute en 2012 pour les 3 grandes groupes tricolores : France Telecom, Alcatel et Vivendi, excusez du peu !!!), il fallait absolument reconstruire la confiance entre les investisseurs et les entreprises.

Mais le soufflé a du mal à passer et reste sur l’estomac de très nombreux actionnaires: une très longue phase de digestion commence alors à partir de 2003. Surtout que l’on apprend, au fur et à mesure que se déroulent les procès, les nombreuses malversations perpétuées des 2 côtés de l’Atlantique : Kenneth Lay, le PDG d’Enron aurait ainsi vendu des centaines de millions de dollars en actions, …alors qu’il incitait ses salariés à garder leurs titres ! En France, la saga de Messier et de Vivendi allait défrayer la chronique judiciaire jusqu’à la fin des années 2010, avec de nombreux rebondissements.

Lors de ces grands déballages, le système des stock-options est vivement critiqué (certaines compagnies y renonçant définitivement pour leurs salariés), le rôle des agences de notation (Standard & Poor’s, Moody’s ,…), accusées d’être des accélérateurs de crises (en cas de dégradation de notation) est également passé au crible.

Mais de notre point de vue, la conséquence la plus dommageable de ce krach de la bulle Internet a été la genèse de la prochaine crise, …celle des subprimes qui éclatera à son tour, 7 ans plus tard.

Comprenez bien ceci : Dégoutés des dot.com en particulier et de la bourse en général, les investisseurs, aidés par Greenspan et ses taux directeurs de la Fed au ras des pâquerettes, allaient se ruer en masse vers l’immobilier US, contribuant ainsi à créer la prochaine crise, celle des prêts hypothécaires toxiques, plus connue sous le nom de la crise des subprimes !