La crise mexicaine de 1994, dite ‘Crise Tequila’ ou ‘Faute de Décembre’

En décembre 1994, quelques jours après son élection, le président mexicain nouvellement élu: Ernesto Zedillo dévalue le peso de 15%. Cette décision envoie un signal très négatif aux investisseurs et provoque une crise financière majeure qui portera le nom de ‘Faute de Décembre’ mais qui est plus connue de ce côté de l’atlantique sous le nom de ‘Crise Tequila’, du nom de la boisson alcoolisée qui tient lieu de champagne local …et dont le malheureux président aurait soi-disant abusé avant de prendre cette décision controversée !

La genèse de la crise du peso mexicain de 1994

En adhérant au GATT en 1986, le Mexique espère bien moderniser son économie, dont le développement est trop en retrait par rapport au puissant voisin nord-américain. En 1988, le président Carlos Salinas de Gortari fait voter des lois pour dérèglementer l’économie nationale. Cela lui permet d’attirer des capitaux étrangers (principalement US) qui contribuent ainsi au développement de l’économie mexicaine.

De 1990 à 1994, c’est plus de 60 milliards de dollars qui s’investissent au Mexique auxquels s’ajoutent plus de 110 milliards de dollars de placements à court terme. Tous ces fonds étrangers sont attirés par des rendements élevés et la sécurité apportée par un mécanisme de parité fixe par rapport au dollar (1 dollar valait alors 3 pesos).

On assiste ainsi à la ‘dolarisation’ de l’économie mexicaine qui apporte avec elle ses excès, en particulier dans le domaine du crédit : les prêts au secteur privé progressent à un rythme annuel de 25 % par an pendant la période.

Mais l’insurrection zapatiste de Janvier 1994 et les assassinats de politiciens (le candidat à la présidence: Luis Colosio en mars, puis le secrétaire général du PRI, Ruiz Massieu en septembre) commencent à créer de l’instabilité dans le pays. L’inflation devient galopante, entrainant un déficit de la balance des paiements (elle atteindra 8% du PIB en 1994). Une dévaluation du peso est alors envisagée début 1994, mais les élections présidentielles programmées en fin d’année ne permettent pas de donner suite à une proposition.

La crise du peso mexicain est déclenchée par le président Ernesto Zedillo en 1994

Le président Ernesto Zedillo déclenche la crise du pesos mexicain en 1994

La décision controversée de dévaluer le peso mexicain de 15%

Au changement de majorité de Décembre 1994, le président nouvellement élu : Ernesto Zedillo décide de faire ce que son prédécesseur n’avait pas osé faire : dévaluer le pesos de 15%.

Cette décision, qui était techniquement justifiée, n’est pas comprise par les marchés qui rentrent en mode panique (*). Résultats : le peso continue sa descente aux enfers en perdant 50% de sa valeur.

Note (*) : L’ex-président éconduit aux élections (Carlos Salinas de Gortari ) aurait qualifié la décision de son successeur de ‘ error de diciembre’ ( ‘la faute de décembre’), une expression qui restera plus connue en occident sous l’appellation de ‘Crise Tequila’.

Mais le gouvernement de Salinas avait émis des bons du Trésor à court terme, des bons émis en dollars, que les banques mexicaines étaient devenus incapable d’honorer à cause de la dévaluation drastique du pesos mexicain.

C’est alors que le Mexique quémanda de l’aide apurés de son riche voisin (Bill Clinton est alors aux affaires) et auprès du FMI : finalement un total de 50 milliards de dollars sera ainsi trouvé pour renflouer l’économie mexicaine.

Mais cette crise du pesos a laissé des traces dans la société mexicaine : taux de chômage triplé, chute du PIB (-7% en 1995) et perte de pouvoir d’achat (52% d’inflation à fin 1995), incitant de nombreux mexicains à rejoindre, souvent clandestinement, le grand voisin américain.

La crise mexicaine n’a eu qu’un impact limité au niveau mondial, seuls les pays d’Amérique du Sud ayant accusé le coup, essentiellement Chili, Brésil et Argentine.

Quant au retour à la normale, il a été relativement rapide car le Mexique était (et est toujours) un gros pays producteur de pétrole et a pu faire bénéficier sa population, des 2 côtés de la frontière, du dynamisme économique de son voisin US.

Quels enseignements retirer de la crise du pesos mexicain ?

Dans les années 1990-1994 l’économie mexicaine était florissante, affichant un excèdent budgétaire propice à son développement. Cela n’a malheureusement pas empêché la crise Tequila de se produire, une crise qui a été certes déclenchée par une faute inadmissible : la dévaluation brutale et sans préavis du pesos (il ne faut jamais heurter les marchés !), mais qui a été la première à mettre en évidence le risque d’asphyxie d’un pays par manque de liquidités.

En effet, en 1994, les réserves internationales du Mexique (réserve de changes et réserves en or) n’étaient tout simplement pas suffisantes pour répondre aux besoins de liquidités du pays.

C’est depuis cette date de 1994 (déclenchement de la crise du peso mexicain) que datent les premiers modèles de prédiction pour éviter les crises économiques. Mais force est de constater que ces modèles n’ont pas permis d’éviter , ni la crise des dot.com des années 2000, ni la crise des Subprimes de 2008, ni celle de la crise de la dette grecque qui n’en finit pas d’alimenter la chronique.

Il est fort probable que ces modèles de prédiction, élaborés à partir des enseignements de la crise Tequila, ont besoin de quelques réglages et que cela prendra encore …un certain temps!