Quel est le rôle de la Banque Mondiale ?
Estampillée d’un nom aussi pompeux, la Banque Mondiale suscite l’intérêt et attire indéniablement la question: « A quoi ça sert une Banque Mondiale ? » De la même façon, son positionnement par rapport au FMI (plus médiatisé avec sa présidente française Christine Lagarde) est également un sujet de conversation relativement fréquent. Nous allons essayer d’y voir clair sur les rôles et missions de cette BM (ou MB ‘Mondial Bank’ pour les anglo-saxons, site http://www.banquemondiale.org), ainsi que sur ses liens par rapport au Fonds Monétaire International.
Comment et quand a été créé la Banque Mondiale ?
Pour commencer, savez-vous que la Banque Mondiale et le FMI, sont en fait des frères jumeaux, nés tous les deux en 1944, suite à la tenue de la célèbre conférence de Bretton Woods. Si la mission initiale du FMI était alors de veiller sur la parité des monnaies (suite à la mise en place du système d’étalon de change-or), le rôle de la BIRD (Banque Internationale pour la Reconstruction et le Développement) était de soutenir le processus de reconstruction de l’Europe meurtrie par la Guerre. La tâche était immense et c’est la France qui a bénéficié la première des prêts de cette BIRD, à hauteur de 250 millions de dollars, une véritable fortune pour l’époque (1947).
La reconstruction du vieux continent étant bien avancée, les pays fondateurs décident alors de réorienter les missions de cette BIRD vers la réduction de la pauvreté dans le monde, une bien noble cause !
Pour ce faire, le Groupe Banque Mondiale prend forme, attirant auprès de la BIRD, 4 autres grandes institutions que sont l’IDA (Association Internationale de Développement), l’IFC (Société Financière Internationale), la MIGA (Agence Multilatérale de Garantie des Investissements) et le CIRDI (Centre International pour le Règlement des Différends relatifs aux Investissements).
Ces 5 institutions collaborent entre elles et avec le FMI de façon à aider les pays pauvres à se développer. Elles mettent en œuvre des plans pluriannuels grâce au financement reçu des pays membres (au nombre de 188 en 2016) et grâce à l’émission d’obligations.
Quel est le mode de fonctionnement de la Banque Mondiale ?
Le Groupe Banque Mondiale est composé d’experts, d’ingénieurs et d’analystes financiers qui étaient initialement tous basés à Washington. Avec l’internationalisation de ses missions, le personnel de la BM est aujourd’hui réparti dans les différentes représentation à l’étranger, le site de Washington n’accueillant désormais que les 2/3 de l’effectif de la noble institution qui compte 10 000 employés.
Au niveau gouvernance, la BM a hérité d’un processus archaïque mais toujours en vigueur de nos jours : selon une règle tacite en usage depuis 1944, le Président de la Banque Mondiale est désigné par le gouvernement US. En contrepartie, le président du FMI est désigné par les gouverneurs européens.
Depuis le 1er Juillet 2012, c’est Jim Yong Kim qui préside aux destinées de la BM, ayant succédé à Robert Zoellick
A noter que les Présidents des 2 institutions jumèles issues de Bretton Woods (Jim Yong Kim et Christine Lagarde) se fréquentent régulièrement, publient des communiqués communs et vont parfois en mission ensemble pour traiter des problèmes aux 4 coins de la planète.
Ils se font aider par 25 administrateurs permanents qui résident à Washington (5 administrateurs nommés pour les 5 pays actionnaires principaux, le reste du conseil d’administration étant élu par les autres pays membres).
Enfin un Conseil des Gouverneurs, constitué des ministres des finances ou du développement des 188 pays membres, se réunit une fois par an pour entériner les grandes orientations.
Quelles sont les grandes actions menées par la Banque Mondiale ?
L’action principale menée par la BM consiste à prêter de l’argent aux pays en voie de développement ou en reconstruction après un conflit. Ces prêts sont octroyées sur de longues périodes (40 ans ou plus) et avec des taux d’intérêt très faibles (voire nuls). N’étant pas soumise aux contraintes de l’actionnariat privé, la BM reverse ses bénéfices au profit des populations les plus déshéritées.
Mais l’organisation a également pour missions de réduire la faim dans le monde, d’améliorer l’accès à l’eau potable, ou encore de lutter contre les grandes épidémies en favorisant l’accès aux vaccins des populations défavorisées. A cela s’ajoute des exigences environnementales (lutter contre le réchauffement climatique) ou éthique (lutter contre la corruption).
A titre d’exemple, la Banque Mondiale vient de participer à la reconstruction du Timor Oriental après son indépendance ou continue à financer la lutte contre le Sida en Guinée.
Pourquoi la Banque Mondiale est-elle parfois controversée ?
Après avoir parcouru ses nombreuses attributions (toutes à finalités humanitaires), on peut logiquement se demander pourquoi une telle organisation est parfois l’objet de critiques? Trois types de reproches sont formulés sur la Banque Mondiale :
L’hégémonie étasunienne
Comme nous l’avons vu plus haut, la BIRD (l’ancêtre de la BM) a été créé aux USA et le siège international de la banque mondiale est toujours situé à Washington. De plus, depuis Bretton Woods, le président de la BM est toujours désigné par le gouvernement US : pas très démocratique comme procédé pour une organisation qui regroupe 188 pays et qui prêche la transparence auprès des récipiendaires de ses aides !
A noter qu’en 2010 une réforme a été mise en place pour améliorer l’actionnariat des pays en voie de développement…mais le président de la BM reste toujours nommé par les USA !
Le lobby des multinationales
Quand on parle de projets de reconstruction, on parle inévitablement des sociétés mandatées pour mettre en œuvre ces projets. Et il faut bien reconnaitre que les solutions de redressement, élaborées depuis Washington ont fait souvent appel à de grandes groupes internationaux ayant leurs racines aux USA. Les mouvements altermondialistes dénoncent régulièrement cette suprématie des grands groupes US et militent pour une meilleure répartition des investissements auprès des petites structures locales.
Le scandale de l’affaire Wolfowitz
Même si cette affaire est loin derrière nous elle a entaché la réputation de la noble institution.
En 2007, alors qu’il était en fonction depuis 2 ans seulement, le président Paul Wolfowitz a été accusé de favoritisme au profit de sa compagne Shaha Riza (une employée de la BM) qui avait été promue et augmentée de façon surprenante. Celui qui se faisait appeler ‘l’incorruptible!’ a du démissionner de ses fonctions.
A noter que la Banque Mondiale a su néanmoins se reformer, particulièrement dans la dernière décade. Dans sa lutte contre la pauvreté, elle essaie désormais de s’appuyer d’avantage sur des entreprises locales et de prendre en compte les aspects sociaux et environnementaux. Manifestement, malgré les critiques formulées à son encontre, la Banque Mondiale sert définitivement…à quelque chose !